Les Babyloniens avaient déjà inscrit à la même place dans leur ciel les
Grands Jumeaux célestes, ces deux étoiles de même éclat, figurant dès lors deux êtres
semblables.
Faisons dès lors plus ample connaissance avec les Gémeaux, Castor et Pollux pour les intimes,
dont l’histoire de la naissance dans des circonstances demeurées floues sème le doute dans la tradition
et est associée à celle du Cygne (censé représenter Zeus ayant pris cette apparence pour
séduire Léda, reine de Sparte) et de l’Aigle.
Léda, donc, se promène au crépuscule dans son jardin du Mont Taygète quand son
regard est attiré par le curieux ballet aérien de deux beaux oiseaux. L’aigle
plonge sur le cygne majestueux qui esquive habilement ses attaques. A la fin, le
rapace disparaît d’un coup d’aile puissant dans le ciel de Zeus, tandis que le cygne
épuisé se pose auprès de Léda.
La reine blottie contre l’immaculé duvet oublie que la
nuit tombe... Tyndare (le roi son mari) inquiet a l’immense surprise de découvrir
sa légitime assise sur la terrasse avec un gros œuf sur les genoux. Après avoir
écouté les explications de sa moitié, Son Altesse place l’œuf à l’abri dans une
chambre forte, interprétant dans ce phénomène la volonté manifeste des dieux.
Seule la reine s’y rend souvent en cachette, jusqu’au jour où, arrivé à maturité
l’œuf s’ouvre en moitiés égales dans lesquelles dorment deux par deux, de ravissants
bébés, deux garçons, deux filles. L’instinct maternel submerge Léda qui se prend de
la même affection pour chacun des enfants qui seront désormais présentés au peuple
comme les siens et ceux de son époux...
Castor et Pollux, les garçons, la blonde Hélène et la brune Clytemnestre
recoivent les vœux contraints de l’assemblée, ce qui n’empêche pas les bruits de
circuler sur les circonstances obscures de leur naissance.
Ils grandissent... Pollux plus doué, plus adroit mais généreux partage tout
avec son frère. Hélène dont la beauté est connue de toute la Grèce, n’est pas enviée
par sa sœur qui l’aime de tout son cœur.
Convoitée puis enlevée par Thésée roi d’Athènes, Hélène est d’abord sauvée par
ses frères. Ses parents jugent alors prudent de lui trouver un mari protecteur.
Les enchères ouvertes, la bataille sera rude. Hélène choisit Ménélas, roi de Mycènes,
mais c’est Pâris, roi de Troie, qui l’emprisonnera dans la ville aux épaisses
murailles... Du haut des remparts la belle Hélène assistera à la guerre, au massacre
de ses prétendants, mais n’y reconnaîtra pas ses frères déjà envoyés « ad patres »
lors d’autres aventures que nous allons vous conter, la plus célèbre étant la
conquête de la Toison d’Or pendant l’expédition des Argonautes.
Jason, fils d’Eson, pour mettre toutes les chances de son côté, fait une moisson de
héros, dont les deux fils de Tyndare, pour l’accompagner dans cette aventure. Pollux
y affrontera le géant de Bithynie lors d’un combat sanglant d’où il sortira vainqueur,
en asseyant sa réputation de générosité et en épargnant la vie du géant après lui
avoir fait la morale...
Mais parce que les deux frères savaient parfois être de véritables racailles,
ils provoquèrent le combat fatal...
Après avoir enlevé les filles de Leucippos la veille de leur mariage avec leurs
cousins, Castor et Pollux furent poursuivis par les fiancés et leur père furieux.
Castor propose de limiter l’affrontement à lui-même et Lyncée, l’un des fiancés,
mais il tombe devant son frère, transpercé par l’épée de Lyncée.
Pollux cédant à la douleur, tue à son tour l’assasin de Castor. Idas, l’autre fiancé
floué, fâché et ne sentant plus sa force, tente d’écrabouiller le jumeau survivant
avec la stèle d’un tombeau.
C’est alors que Zeus, un peu énervé, pointe son nez dans le ciel et d’un coup
de foudre (pas un truc d’amoureux, un vrai coup de foudre) tue Idas et sauve Pollux.
Il s’adresse ensuite à lui en ces termes : "Tu es né de l’œuf que j’ai déposé sur
les genoux de Léda, avec Hélène vous êtes mes enfants... tu me rejoindras dans
l’immortalité mais ton frère Castor est fils de Tyndare et subira le sort des
mortels".
Mais Pollux ne l’entend pas de cette oreille ! Il préfèrera renoncer à
la vie éternelle plutôt que d’être séparé de Castor. Zeus, bluffé par cet
indéfectible amour les réunit finalement dans l’immortalité.
Et c’est ainsi qu’on peut les voir fraternellement enlacés, brillant du même
éclat accrochés au firmament, venir au secours des combattants et des marins en
perdition.
Là, normalement, le générique apparaît à l’écran, mais l’histoire serait
incomplète si l’on n’évoquait pas l’autre version de la fin de Castor. De retour de
leur expédition avec Jason dans le port d’Iolcos en Thessalie, les jumeaux
profiteront de l’accueil empressé de la foule venue saluer leurs exploits. Plus tard
à l’auberge où tous fêtent le succès de l’aventure, Castor et Pollux, inséparables
et juchés sur une table, prennent la parole. Pollux se déclare heureux de retrouver
la belle nature et la compagnie des jeunes filles de son pays, Castor renchérit en
disant qu’ils s’apprêtent à rejoindre leurs promises et néanmoins cousines, Phoebé
et Hilaera, sans se douter que celles-ci allaient épouser Idas et Lyncée leurs autres
cousins.
Ils se vengent en les enlevant et après leurs mariages s’installent à Sparte.
Le temps passe, Idas et Lyncée réapparaissent en leur proposant une affaire...
Se croyant pardonnés, les jumeaux se laissent embarquer dans l’organisation d’un vol
de troupeau appartenant à Lycaon, le tyran d’Arcadie. Le forfait accompli, ils
s’apercoivent qu’ils se sont fait rouler et dérober leur part du butin. Ce qui
aurait pu passer pour un jeu finit tragiquement. Idas tue Castor d’un coup de
javelot, Pollux ivre de rage poursuit ses adversaires jusque dans un cimetière
(apparemment le même que dans la précédente version !!). Ayant tranché la gorge de
Lyncée, il allait terminer le travail avec Idas, quand Zeus (toujours Marcel) du haut
de son ciel lui coupe l’herbe sous le pied en foudroyant la future victime.
Pollux, l’immortel resté seul, fit à Castor de grandioses funérailles et
prononça le serment de venir un jour sur deux aux Enfers lui témoigner son amour.
Des siècles durant, il tint parole.
Jusqu’au jour où Zeus, ému par tant d’attachement décida de les installer
fraternellement enlacés pour l’éternité, côte à côte et plus brillants que jamais,
accrochés à la voute céleste...
Dans de nombreuses cultures, les étoiles que nous appelons Castor et Pollux sont considérées comme
jumelles. C'est ainsi qu'en Nouvelle Zélande, les Maoris les considéraient comme deux jumeaux qui ne
se quittaient jamais depuis leur tendre enfance. Leurs parents, pensant leur rendre service, voulurent
les séparer, mais quand les jumeaux eurent vent de ce projet, ils se sauvèrent en pleine nuit et, du
sommet d'une haute montagne, sautèrent sur la voûte céleste où ils prirent l'apparence de deux étoiles.
Astronomie pour les myopes -
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