Le gallium (Z = 31)

A l'instar de l'alumunium, le gallium appartient à la famille des métaux pauvres. On lui connait 31 isotopesOn appelle isotopes des atomes ayant le même nombre de protons, mais qui différent par leur nombre de neutrons., mais seuls deux d'entre eux sont stables : le gallium 69 (69Ga) pour 60%, et le gallium 71 (71Ga), pour 40%.
Peu abondant dans la croûte terrestre (sans être rare pour autant), son clarke, autrement dit sa teneur massique moyenne, est de 19 ppm (partie par million), soit 19 g/tonne.

Origine du gallium

Le gallium est essentiellement produit par capture de neutrons, comme nombre d'éléments plus lourds que le fer, lors de l'explosion d'étoiles massives, selon un mécanisme appelé processus r, la lettre r signifiant qu'il s'agit d'un processus de capture rapide, nécessitant un flux de neutrons très élevé.

Un peu d'histoire

L'histoire de la découverte du gallium est étonnante. Alors qu'il met en place les éléments chimiques dans son fameux tableau, le chimiste russe Dmitri Mendeleïev constate que sous l'aluminium, une case est toujours vide : c'est ainsi que vers 1870, il prédit l'existence d'un nouvel élément qu'il appelle "éka-aluminium" (le préfixe éka, d'origine sanskrite, sert à désigner un élément inconnu situé sous la case d'un élément connu). Encore plus fort, il est capable d'anticiper certaines de ses propriétés, comme sa masse volumique qu'il estime devoir être de 5,9 g/cm3. En 1875, le chimiste français Paul-Émile Lecoq de Boisbaudran découvre l'élément en question en analysant un échantillon de sulfure de zinc provenant de la mine de Pierrefitte, dans les Pyrénées. Il l'appelle Gallium "en l'honneur de la France", pour reprendre ses propres termes, Gallia étant l'ancien nom latin de la France.

Paul-Émile Lecoq de Boisbaudran
Paul-Émile Lecoq
de Boisbaudran

Lorsqu'il a vent de cette découverte, Mendeleïev envoie un courrier à l'Académie des sciences de Paris, dans lequel il rappelle que "Le gallium est l'éka-aluminium que j'avais prédit. Son poids atomique est environ 68, sa densité est environ 5,9. Voyez si c'est correct." C'est là que cette affaire devient incroyable. Quand Boibaudran dispose enfin d'une quantité suffisante (moins d'un décigramme) de cet élément pour effectuer des mesures, il estime que sa densité est proche de 4,7. Mendeleïev n'en resta pas là, et lui écrit pour lui dire qu'il se trompe, que son échantillon n'est sans doute pas suffisamment pur. Boibaudran refait alors ses mesures à l'aide d'un échantillon plus gros et là... il trouve bien une densité de 5,9, comme l'avait prédit le chimiste russe !

Propriétés du gallium

Le gallium pur est un solide d'aspect argenté, aussi cassant que le verre. Sa température de fusion étant de 29,8°C il suffit de le tenir dans la main pour le faire fondre. Il peut par ailleurs être maintenu dans l'état liquide à température ambiante grâce au phénomène de surfusionUne substance est en état de surfusion lorsqu'elle reste à l'état liquide alors que sa température descend en dessous de sa température de solidification. C'est parfois le cas de l'eau quand elle est très pure (elle ne doit pas contenir de poussières), mais il suffit alors d'une petite perturbation (comme un léger choc) pour qu'elle gèle instantanément., à l'instar du césium et du rubidium. Sa température d'ébullition est de 2 204°C, ce qui en fait l'élément ayant la plus grande plage de température où il se trouve à l'état liquide.

Echantillon de gallium solide
Echantillon de gallium solide

Le gallium possède une autre caractéristique étonnante, qu'il partage avec l'eau, le bismuth et l'antimoine : lorsqu'il se solidifie, il augmente légérement de volume (sa densité diminue donc d'autant), ce qui a pour conséquence que le gallium à l'état solide flotte sur sa phase liquide.
Présent en très faible quantité dans notre corps (un adulte de 80 kg en contient environ 0,8 mg), on pense qu'il ne joue aucun rôle dans son fonctionnement. Considéré comme peu toxique, il ne présente pas de danger pour notre santé, du moins aux doses auxquelles nous sommes confrontés quotidiennement, que ce soit dans l'environnement ou dans l'alimentation. Il semble être toutefois légèrement corrosif pour les muqueuses et la peau : il est en effet connu pour laisser une tache sur les mains après manipulation.

Production industrielle du gallium

Comme il n'existe pas de gisement de gallium à proprement parler, celui-ci est principalement coproduit (à près de 95%) lors du traitement de la bauxite, minerai destiné à fournir de l'aluminium.

Echantillon de bauxite
La bauxite contient de petites
quantités de gallium.

La première étape consiste à broyer la beauxite puis à l'attaquer à l'aide d'une solution de soude concentrée et chaude, ce qui permet de séparer l'aluminium et le gallium des éléments indésirables (oxydes de fer, silice...), qui vont donner des boues rouges. L'aluminium et le gallium se trouvent alors en solution, sous forme d'ions aluminates et gallates hydratés. La solution est ensuite diluée et refroidie, puis on ajoute de petites quantités d'hydroxyde d'aluminium afin de provoquer la précipitation des ions aluminantes, mais pas celle des ions gallates car ils sont présents en quantités trop faibles. Le même processus est répété pluseurs fois, ce qui a pour effet de concentrer les ions gallates, que l'on récupère par électrolyse sur une cathode de mercure, avec lequel ils forment un almalgame. Cet amalgame est ensuite décomposé par action de la soude, ce qui donne du gallate de sodium pratiquement pur, sans aluminium, qui est à nouveau électrolysé sur une cathode d'acier inoxydable. On obtient de la sorte du gallium pur à 99%. Après avoir été filtré sous vide et lavé à l'acide chlorhydrique, on obtient une pureté de 99,99%, ce qui reste insuffisant (et de loin) pour fabriquer des composants électroniques (semi-conducteurs). Il faut donc le raffiner, ce qui se fait généralement par croissance d'un monocristal dans un bain de gallium liquide, de façon à obtenir du gallium ultrapur (à 99,99999%).

En 2022, production mondiale de gallium dit primaire (pur à 99,99%) est de 870 tonnes, la Chine étant loin en tête avec 540 tonnes.

Quelques exemples d'utilisation du gallium

- Le gallium sert principalement à fabriquer des matériaux semi-conducteurs, en particulier de l'arséniure de gallium (GaAs) et du nitrure de gallium (GaN), utilisés pour confectionner des diodes électroluminescentes (DEL) et des puces.

- Le nitrure de gallium est à l'origine de la lumière bleue émise par les lasers des disques blu-ray.

- Depuis que le mercure est interdit dans les thermomètres, on utilise parfois du galinstan, alliage de gallium, d'indium et d'étain, liquide à température ambiante (et jusqu'à -19°C).

- Le gallium 67 (69Ga), radio-actif, est utilisé en imagerie médicale pour détecter les sites d'infections localisées (ostéomyélites (infections osseuses), pneumonies, tuberculose), ainsi que les lymphomes (tumeurs malignes du système lymphatique) et les carcinomes (cancers de la peau).



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