Bien que l'on en trouve que très peu sur Terre, l'hélium est, après l'hydrogène, le second élément le plus abondant dans l'univers : en effet, près de 8 % des atomes sont des atomes d'hélium (ce qui représente près de 24 % de la masse totale).
Remarque : il sera ici uniquement question de l'hélium 4, isotopeOn appelle isotopes des atomes ayant le même nombre de protons, mais qui différent par leur nombre de neutrons. stable de l'hélium dont le noyau est constitué de 2 protons et de 2 neutrons (donc de 4 nucléonsDu latin "nucleus" signifiant "noyau", les nucléons sont les composants des noyaux atomiques, autrement dit les protons et les neutrons. On appelle nombre de masse, noté A, le nombre de nucléons que contient un atome.).
Cela fait près de treize milliards d'années que des quantités colossales d'hydrogène sont transformées en hélium dans le cœur des étoiles. Pour prendre l'exemple du Soleil, en son sein, ce sont chaque seconde 619 millions de tonnes d'hydrogène qui "disparaissent" pour donner naissance à 614 millions de tonnes d'hélium, et ce depuis des milliards d'années. Pourtant, malgré ces chiffres impressionnants, l'abondance de l'hélium ne peut être expliquée par ce seul mode de formation : il y en a beaucoup trop ! La solution a été apportée en 1948, dans un article intitulé "The Origin of Chemical Elements", plus connu sous le nom d'article "alpha beta gamma" en raison du nom de ses auteurs : Ralph Alpher, Hans Bethe et George Gamow (en réalité, Bethe n'a pas contribué à sa rédaction mais son ami Gamow, qui avait l'esprit très facétieux, ajouta son nom à seule fin de faire un jeu de mot). Et que dit cet article ? Il dit que lors des premières minutes qui ont suivi le Big Bang, les conditions de température et de pression étaient telles qu'elles ont permis la synthèse de grandes quantités d'hélium. Cette fois-ci, le compte y est. La "nucléosynthèse primordiale", puisque tel est le nom donné à cet événement, est d'ailleurs considérée comme l'un des trois piliers sur lesquels repose la théorie du Big Bang (les deux autres piliers étant l'expansion de l'univers et le rayonnement de fond cosmologique).
L'histoire de la découverte de l'hélium est pour le moins étonnante : ce dernier a en effet été détecté pour la première fois dans le Soleil, bien avant de l'être sur Terre. Comment est-ce possible ? Grâce à la spectroscopie, cet outil incontournable qui permet, entre autres choses, d'analyser la composition chimique des étoiles (mais pas seulement...).
En 1814, l'opticien et physicien allemand Joseph von Fraunhofer (1787-1823) confirme l'existence de raies sombres (observées quelques années plus tôt par l'anglais William Wollaston) dans le spectre du Soleil, raies qui portent depuis le nom de raies de Fraunhofer. Leur nature est restée mystérieuse jusqu'à ce que, dans les années 1860, un physicien (Gustav Kirchhoff) et un chimiste (Robert Bunsen), tous deux allemands, trouvent l'explication : ces raies sont la signature des éléments chimiques présents dans le Soleil. Il est donc possible, contrairement à ce qu'affirmait le philosophe Auguste Comte, d'analyser la composition chimiques des astres (étoiles, nébuleuses...) à distance.
C'est ainsi que, par comparaison avec des raies spectrales obtenues artificiellement en
laboratoire, on réussit à mettre en évidence dans l'atmosphère du Soleil la présence de sodium,
de cuivre, de calcium, de magnésium, d'hydrogène, de fer, de titane, de nickel, de cobalt, et j'en
passe... Toutefois, lors de l'éclipse totale de Soleil du 18 août 1868, l'astronome français Jules
Janssen (1824-1907) découvre dans le spectre d'émission (constitué de raies lumineuses) de la
chromosphèreLa chromosphère correspond à la basse atmosphère du
Soleil. Elle est comprise entre la photosphère (surface visible du Soleil) et la
couronne (partie haute de l'atmosphère solaire, visible lors des éclipses totales
de Soleil).
du Soleil, une raie jaune qui ne correspond à aucun élément chimique répertorié sur Terre. Quelques
mois plus tard, c'est au tour de l'astronome anglais Norman Lockyer (1836-1920) d'observer
cette fameuse raie jaune. Il en profite d'ailleurs pour baptiser le mystérieux élément qui en est
à l'origine : il l'appelle hélium, en référence à Hélios, dieu du Soleil dans la mythologie
grecque.
Il faudra attendre près de 27 ans (jusqu'en mars 1895 pour être exact) avant qu'un chimiste anglais,
William Ramsay (1852-1916), ne parvienne à détecter la présence d'hélium dans des roches
terrestres, au cours de l'analyse d'un échantillon de clévéite, un minerai riche en uranium.
La radioactivité naturelle due à l'uranium et au thorium est à l'origine de la formation d'hélium dans la croûte terrestre, car ces éléments émettent des particules alpha (autrement dit des noyaux d'hélium) lors de leur désintégration. L'hélium ainsi produit peut s'accumuler dans des poches formées par des roches imperméables, mélangé à du gaz naturel (qui peut en contenir jusqu'à 7 %). En 2019, la production mondiale d'hélium s'élevait à environ 160 millions de m3, parmi lesquels 89 millions de m3 étaient dus aux seuls Etats-Unis, détenteurs des principaux gisements (notamment au Kansas, au Texas et en Oklahoma).
Premier élément du groupe des gaz nobles, l'hélium est totalement inerte chimiquement : on ne
lui connait aucun composé stable, du moins dans les
CNTPLes CNTP ou conditions normales de température et de pression sont
considérées de façon arbitraire comme étant les conditions d'expérimentation et de mesure en laboratoire,
définies par une température de 0°C (273,15 K) et une pression de 1 atmosphère (soit 101 325 Pa ou 1,013
bars).
(conditions normales de température et de pression). Regardons plutôt du côté de ses propriétés
physiques, si l'on ne veut pas s'ennuyer. Tout d'abord, il s'agit du gaz le plus léger après le
dihydrogène, avec sur ce dernier l'immense avantage de ne pas être inflammable. Ensuite, il s'agit de
l'élément dont la température de liquéfaction est la plus basse : - 269°C ! Entre - 269 et - 271°C, il
se présente sous la forme d'un liquide incolore appelé "hélium I", mais c'est en dessous de - 271°C que
les choses deviennent vraiment intéressantes. Il passe alors dans un nouvel état liquide, appelé "hélium
II", où il perd toute viscosité et n'oppose plus aucune résistance à l'écoulement, devenant ce que l'on
appelle un superfluide. Pour faire court, un superfluide est un liquide au comportement hors
norme. Jugez plutôt ! Quand on verse de l'eau (ou n'importe quel liquide) dans un verre, elle reste
bien sagement au fond (à condition bien entendu d'être au repos). Normal. Sauf qu'un superfluide aura
tendance, lui, à "grimper" tout seul le long des parois du verre et à s'en échapper
!.
Autre bizarrerie, quand on met sur le feu une casserole remplie d'eau, l'eau qui est au fond chauffe,
se dilate, devient plus légère, ce qui la fait remonter à la surface tandis que de l'eau plus froide
prend sa place, chauffe à son tour, se dilate, remonte à la surface, et ainsi de suite... Cela
s'appelle la convection. Avec l'hélium superfluide, rien de tout cela : la chaleur se propage
uniquement par conduction, et ce quasi-instantanément (à près de 20 m/s). Dans un superfluide,
la température sera donc à tout instant partout la même, empêchant ainsi tout mouvement de convection.
Outre son caractère superfluide à basse température, l'hélium est la seule substance qui reste liquide
à pression normale jusqu'au zéro absolu, soit -273,16°C.
- Etant près de sept fois moins dense que l'air, l'hélium est employé pour gonfler les ballons de baudruche si chers aux enfants, les dirigeables et la plupart des ballons sondes, envoyés en altitude afin d'étudier l'atmosphère et la météorologie.
- Les atomes d'hélium sont tellement petits qu'ils diffusent facilement à travers les parois fines ou poreuses (cela explique pourquoi les ballons de baudruche gonflés à l'hélium finissent par retomber), ou les joints dont l'étanchéité est imparfaite. C'est la raison pour laquelle ce gaz est parfois utilisé pour détecter les fuites dans les réservoirs à haute pression.
- L'hélium liquide est utilisé pour maintenir à très basse température les aimants supraconducteursUn supraconducteur est un matériau qui, en dessous d'une certaine température (généralement très basse), voit sa résistance électrique devenir nulle., utilisés notamment dans les appareils d'IRM, ou encore au LHC (Large Hadron Collider), ce grand accélérateur de particules situé à proximité de Genève, qui nécessite à lui seul une centaine de tonnes d'hélium liquide maintenu à une température de -271°C.
- Il permet d'assurer le transport et l'évacuation de la chaleur dans certains types de réacteurs nucléaires refroidis au gaz.
- Il est utilisé comme atmosphère protectrice lors de la fabrication des circuits intégrés et des fibres optiques.
- En plongée sous-marine à grande profondeur, l'air comprimé est remplacé par un mélange d'hélium et
de dioxygène, appelé "Héliox". Le diazote, principal constituant de l'air (à près de 78 %), présente en effet
un gros défaut. Etant soluble dans le sang, il a tendance à s'y accumuler au fur et à mesure que l'on descend
et que la pression augmente, et au-delà d'une quarantaine de mètres de profondeur (variable selon les personnes),
il est responsable d'un phénomène appelé narcose ou ivresse des profondeurs, qui peut se traduire
pas divers symptômes : euphorie, angoisse, troubles de la vision, réflexes ralentis... autant de désagréments
qui sont supprimés lorsqu'on le remplace par de l'hélium (du moins jusqu'à une certaine profondeur, car l'hélium
peut à son tour poser problème). Mais ceci n'est pas un site de plongée...
Un dernier point : les personnes qui parlent après avoir inhalé de l'hélium ont une "voix de canard". Cela vient
du fait que la célérité (vitesse) du son est environ trois fois plus grande dans l'hélium (1007 m/s à 20°C) que
dans l'air (343 m/s à 20°C).
- Les lasers hélium-néon, tout premiers à avoir été inventés (en 1960), ont longtemps été utilisés dans les lecteurs de code-barres (avant d'être remplacés par les lasers à diode).
- Dans certaines fusées, la pressurisation des réservoirs d'ergols peut être assurée par un gaz inerte, généralement de l'hélium ou du diazote.
- L'hélium est également employé comme gaz d'emballage (additif alimentaire E939), afin d'empêcher l'oxydation des aliments et le développement de micro-organismes.
Il y aurait encore bien des choses à dire à propos de l'hélium et de ses propriétés, mais la place
manque, malheureusement...
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