Le cobalt possède 29 isotopesOn appelle isotopes des atomes ayant le même nombre de protons, mais qui différent par leur nombre de neutrons. connus, mais un seul d'entre eux, le cobalt 59 (59Co) est stable. Métal relativement peu abondant dans la croûte terrestre (il n'occupe que la 32ème place) c'est un co-produit de l'exploitation d'autres métaux (en particulier du cuivre et nickel).
Le cobalt présent dans l’Univers est synthétisé lors de l'explosion d'étoiles massives (au moins huit masses solaires) arrivées au terme de leur existence (supernovae de type II), ainsi que (et même principalement) lors de l'explosion de naines blanches (supernovae de type Ia) dont la masse, augmentant progressivement en raison d'un apport de matière provenant d'un compagnon, finit par atteindre la limite dite de Chandrasekhar (1,4 masses solaires).
Bien qu'il n'existe pas à l'état natif, le cobalt est présent dans de nombreux minéraux, utilisés dès l'Antiquité pour fabriquer des pigments bleus. Les Egyptiens en font usage au XVè siècle av. J.-C. pour teinter le verre, et dans la peinture vers 2600 av. J.-C.. Ces pigments sont également utilisés en Assyrie (dans des fresques remontant au XIè siècle av. J.-C.), en Chine (dans l'émail sur porcelaine), en Grèce (sur certains vases)... En Italie, de magnifiques coupes en verre colorées au cobalt, datant du début de l'ère chrétienne, seront retrouvées dans les ruines de Pompéi. Bien plus tard, aux alentours du XIIè siècle, les maîtres verriers de l'île de Murano (située au nord de Venise) feront usage de pigments à base de cobalt pour teinter le verre, le fameux "verre bleu de Murano", que la noblesse s’arrache alors à prix d’or. Il faut toutefois attendre l'année 1802 avant qu'un français, le baron Louis Jacques Thénard, chimiste de son état, ne parvienne à synthétiser le premier bleu de cobalt (aluminate de cobalt, de formule Al2CoO4), commercialisé sous le nom de "bleu de Thénard". Soit dit en passant, c'est ce même baron Thénard qui inspirera à Victor Hugo son personnage de Thénardier dans Les Misérables, ledit Thénard s'étant opposé à sa proposition de réduire le temps de travail des enfants dans les usines.
Les gisements de cobalt, cela ne court pas les rues. En Europe, la plupart se trouvent dans les Monts Métallifères, chaîne de montagnes faisant office de frontière naturelle entre la Saxe (Allemagne) et la Bohème (Tchéquie), or cette région était autrefois célèbre pour ses riches mines d'argent, exploitées depuis le XIIè siècle. L'argent et le cobalt ont donc tendance à y cohabiter (avec le nickel et le fer), ce qui n'est pas sans poser certains problèmes car les minerais de cobalt les plus courants contiennent des composés soufrés et arséniés. Lorsque les métallurgistes chauffaient ces minerais afin d'en extraire l'argent, il n'était pas rare qu'il s'en dégage des émanations malodorantes et toxiques (de trioxyde d'arsenic), que les mineurs attribuaient à la présence de lutins malicieux, appelés kobolds dans le folklore germanique. C'est de là que le cobalt tire son nom. Quand à l'argent tant convoité, il va sans dire que les méchants lutins s'en emparaient, laissant aux pauvres mineurs un résidu de minerai sans valeur appelé "speiss".
Jusqu'au XVIIIè siècle, le terme "cobalt" sert à désigner ce résidu, qui sera utilisé au XVIIè
siècle pour fabriquer des pigments bleus, alors très en vogue en Allemagne. En 1735, le chimiste suédois Georg
Brandt parvient à en extraire un nouvel élément, et démontre que ses composants sont responsables de la couleur
bleue conférée aux verres. Dorénavant, c'est ce nouvel élément qui sera appelé cobalt.
Passant inaperçus, les travaux de Brandt seront finalement reconnus en 1780 grâce à l'un de ses compatriotes, le
minéralogiste et chimiste Torbern Olof Bergman, qui parviendra à extraire du cobalt pur.
Le cobalt pur est un métal de couleur gris clair, qui présente des reflets bleutés après polissage. Un peu plus dur que le fer, il est également plus cassant que ce dernier. Relativement dense (sa masse volumique est de 8,9 g/cm3), il ne fond qu'à 1495°C.
A l'instar du fer (et du nickel), le cobalt est ferromagnétique, c'est-à-dire qu'il peut être attiré par
un aimant ou former un aimant permanent. Sa température de Curie (température à laquelle il perd son aimantation
permanante) est de 1115°C, donc beaucoup plus élevée que celles du fer (768°C) et du nickel (354°C).
Protégé par une fine couche d'oxyde, il n'est corrodé ni par l'eau ni par l'air à température ambiante. En revanche,
il peut être attaqué par les halogènes et les composés sulfurés. Il est également attaqué par les acides, en
particulier par les acides oxydants (acide sulfurique, acide nitrique...), et en présence d'air il est dissous par
l'ammoniaque (solution aqueuse de gaz ammoniac).
Considéré comme un oligoélément, il est présent dans la vitamine B12, qui intervient dans la formation des
globules rouges et dans le fonctionnement du système nerveux.
Nous l'avons déjà dit précédemment, le cobalt est présent dans de nombreux minéraux : cobaltite (minéral sulfuré et arsénié), érythrite (arséniate de cobalt), smaltite (arséniure de cobalt), carrollite (minéral sulfuré riche contenant également du cuivre et du nickel)...
Intervenant dans la fabrication des batteries lithium-ion qui équipent les téléphones portables et les véhicules
électriques, le cobalt est de plus en plus convoité, au point de susciter des craintes quant à une éventuelle pénurie.
Estimées aujourd'hui (2023) à 75 ans, les réserves pourraient tomber à 25 ans d'ici 2028, et la situation ne ferait
qu'empirer si le parc automobile devait passer au tout électrique, ce qui exigerait une hausse de près de 1900% de la
production de ce métal.
Dans la majorité des gisements exploités, le cobalt est co-produit lors de l'extraction du cuivre et du nickel. C'est
ainsi qu'en 2020, le cobalt provenait pour 60% de mines de cuivre, et pour 38% de mines de nickel. Les 2% restant
sont produits par la mine de Bou Azza, située au Maroc, qui exploite exclusivement un minerai de cobalt, le smalite
(CoAs3). Actuellement, le plus gros producteur mondial de cobalt (et de très loin) est la RDC (République
Démocratique du Congo), avec 144 000 tonnes en 2022 (à titre de comparaison, l'Indonésie occupe la deuxième place,
avec "seulement" 9 500 tonnes en 2022). Les exportations congolaises sont, à près de 99%, destinées à la Chine qui
fait littéralement main basse sur cette richesse, ajoutant à la rapacité le mépris le plus total de la vie humaine,
puisque l'on estime que près de 40 000 enfants travaillent dans les mines de cobalt, dans des conditions de sécurité
plus que précaires et pour un "salaire" dérisoire. Mais cela n'est pas grave, cela se passe loin de chez nous, alors
courons vite acheter le téléphone portable dernier cri ! Et vive la transition énergétique...
- La plupart des batteries lithium-ion, qui alimentent téléphones portables et voitures électriques, utilisent des cathodes (bornes positives) contenant de l'oxyde de lithium et de cobalt. Ce dernier permet de limiter leur montée en température, ainsi que d'augmenter leur durée de vie et leur capacité de stockage.
- Les aciers au cobalt (qui en contiennent de 5 à 8%) font partie des alliages les plus durs, raison pour laquelle on les utilise pour fabriquer des mèches de fraiseuses et de perceuses. Le cobalt permet en outre d'améliorer la résistance aux températures élevées, à l'usure et à la corrosion.
- Le cobalt 60 (60Co) est un isotope radioactif du cobalt, émetteur de rayons gamma, dont la périodeLa période radioactive (ou demi-vie) d'un élément radioactif est la durée nécéssaire pour que la moitié des atomes de cet élément se désintègrent spontanément. est de 1925 jours. Longtemps utilisé en radiothérapie, il est souvent employé dans l'industrie pour stériliser le matériel médical ou les denrées alimentaires (les rayons gamma, très ionisants, détruisent les bactéries). Une autre application, beaucoup moins glorieuse (c'est un euphémisme) consiste à ajouter du cobalt 59 dans certaines bombes nucléaires : lors l'explosion, le cobalt 59 absorbe des neutrons et se transforme en cobalt 60, ce qui permet d'avoir davantage de retombées radioactives (oui, vous avez bien lu).
- Certains aimants permanents contiennent du cobalt. Utilisés depuis les années 1930, les aimants en alnico sont constitués, comme leur nom l'indique (il s'agit d'un acronyme), d'aluminium, de nickel et de cobalt, ainsi que de fer (auquel on ajoute parfois un peu de cuivre et de titane). Bien que fragiles, ils présentent l'avantage de conserver leurs caractéristiques magnétiques sur une grande plage de température (de -250°C à +55°C).
Ils ont trouvé de très nombreuses applications : moteurs électriques, montres à quartz, systèmes ABS des
véhicules, hauts-parleurs et écouteurs, éoliennes, alternateurs... (cette liste est loin d'être exhaustive).
Les aimants samarium-cobalt, apparus dans les années 1970, présentent une bonne résistance à la
corrosion, mais ils sont très fragiles et s'écaillent facilement.
- Le cobalt est souvent employé dans les superalliages, en association avec le fer ou/et le nickel. Présentant une bonne résistance mécanique et chimique aux températures élevées, ces alliages complexes sont utilisés dans les turbines à gaz, les réacteurs d'avions de chasse, les réacteurs nucléaires...
- Le bleu de cobalt désigne un groupe de pigments bleus de synthèse, constitués d'aluminate de cobalt, utilisés en peinture ainsi que pour teinter le verre et la céramique.
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