Bien que ce soit l'élément chimique le plus léger (son noyau contient un seul proton, autour duquel tourne un unique électron), c'est également le plus abondant, puisqu'il s'agit du principal constituant des nébuleuses et des étoiles : dans l'univers, près de 92 % des atomes sont des atomes d'hydrogène (ce qui représente 74 % de la masse totale) !
Sur Terre, on le trouve principalement dans la molécule d'eau (H2O), mais il y en a également dans les hydrocarburesLes hydrocrabures sont des composés organiques constitués uniquement d'atomes de carbone et d'hydrogène. (méthane, butane...), ainsi que dans une multitude de composés organiques. Lorsqu'il est à l'état gazeux, il se présente sous la forme de molécules de dihydrogène ayant pour formule H2. Toutefois, on peut également le trouver sous forme monoatomique (H), notamment dans le gaz interstellaire et intergalactique, là où règnent des conditions de pression et de température extrêmement basses.
Selon les théories actuelles, il y a près de 13,7 milliards d'années, eut lieu un événement cataclysmique auquel on donne le nom de Big Bang. Pour ce que l'on en sait, pendant les 380 000 premières années (à quelques jours près) consécutives à cet événement, la matière se présentait alors essentiellement sous la forme d'un plasma (gaz ionisé) extrêmement chaud, constitué d'un mélange de noyaux d'atomes d'hydrogène (protons) et d'hélium (particules alpha), ainsi que d'électrons. Toutefois, l'Univers étant en expansion rapide, cela entraîna une baisse rapide de la densité de matière et de la température. Lorsque cette dernière descendit en dessous de 3000 kelvins, les électrons, moins agités, s'associèrent aux noyaux pour donner les tout premiers atomes stables d'hydrogène et d'hélium (ainsi qu'un peu de lithium). Les autres atomes, plus complexes, n'apparurent que quelques centaines de millions d'années plus tard, au coeur des premières étoiles. Celles-ci sont en effet de véritables réacteurs nucléaires, qui passent la majeure partie de leur existence à réaliser la fusion de l'hydrogène en hélium (elles appartiennent alors à la séquence principale), avant de passer à la fusion de l'hélium en carbone et en oxygène... C'est ainsi que lentement (très lentement), mais sûrement, l'univers s'appauvrit en hydrogène et s'enrichit en éléments plus lourds.
En 1766, le savant britanique Henry Cavendish (1731-1810) reprend une expérience réalisée au XVIè siècle par le médecin suisse Paracelse (1493-1541). Ce dernier avait constaté qu'en faisant agir de l'acide sulfurique sur du fer, il obtenait un gaz inflammable de nature inconnue. En faisant agir des acides sur différents métaux, Cavendish parvient à isoler ce gaz combustible, qu'il appelle "air inflammable". En 1783, celui-ci est rebaptisé hydrogène par le chimiste français Antoine Laurent de Lavoisier (1743-1794). Ce nom, forgé à partir des racines grecques "hudôr" (eau) et "gennen" (engendrer), signifie donc "qui engendre l'eau" : en effet, si l'on brûle de l'hydrogène dans de l'oxygène, on obtient... de l'eau !.
Comme il s'agit du gaz le plus léger (il est 14 fois moins dense que l'air), le dihydrogène a très vite été employé pour gonfler des ballons : le 27 août 1783, celui conçu par le physicien Jacques Charles (1746-1823) s'élève dans les airs, dans l'est du Val d'Oise. Quelques mois plus tard, le 1er décembre 1783, un autre ballon à hydrogène (ou "charlière") décolle depuis les Tuileries, emportant à son bord ce même Jacques Charles accompagné de l'ingénieur Nicolas-Louis Robert.
Quelques décennies plus tard, les premiers dirigeables (gros ballons propulsés par des hélices), seront eux aussi gonflés à l'hydrogène, ce qui n'ira pas sans poser quelques problèmes car, en plus d'être un excellent combustible (et donc potentiellement explosif), ce gaz est particulièrement sujet aux fuites (il diffuse très facilement à travers les parois poreuses). C'est ainsi que le 6 mai 1937, un gros dirigeable allemand de type zeppelin, l'Hindenburg, long de 245 mètres et contenant près de 200 000 m3 de dihydrogène, en fera l'amère expérience. Alors qu'il arrive à Lakehurst (dans le New Jersey, au sud de l'état de New York) après avoir effectué sa trente-septième traversée de l'Atlantique, il s'enflamme subitement !, entraînant la mort de 35 passagers (sur un total de 94) qui se jetterons dans le vide afin d'échapper aux flammes. Le plus navrant dans tout cela, c'est que l'Hindenburg aurait dû être gonflé à l'hélium, gaz non inflammable, mais les Etats-Unis, principaux producteurs de ce gaz (c'était vrai à l'époque, ça l'est encore aujourd'hui), imposaient alors un embargo interdisant d'exporter de l'hélium vers l'Allemagne nazie, qui n'eut d'autre alternative que l'emploi de dihydrogène pour gonfler ses dirigeables.
Outre le ballon de Jacques Charles, l'hydrogène va rapidement trouver d'autres applications. En 1804, l'artilleur (et homme politique) suisse Isaac de Rivaz met au point ce qui est sans doute le tout premier moteur à combustion interne, et cela un demi-siècle avant que Beau de Rochas n'imagine le principe du moteur à quatre temps. S'inspirant du "pistolet de Volta", dans lequel l'explosion d'un mélange gazeux est déclanchée par une étincelle, le moteur de Rivaz est alimenté par un mélange de sulfure d'hydrogène et d'oxygène, dont l'explosion met en mouvement un piston dans un cylindre. En 1806, il adapte son moteur à un petit véhicule de démonstration, la "charrette de Rivaz".
En 1784, l'inventeur Jan Pieter Minckelers découvre le gaz d'éclairage, qu'il obtient en distillant de la houille. Constitué principalement d'un mélange de monoxyde de carbone et de dihydrogène, il en sera fait usage à grande échelle dès le début du XIXè siècle, sous l'impulsion du français Philippe Lebon et de l'anglais William Murdoch. Fabriqué dans des usines présentant un aspect complexe, les fameuses "usines à gaz" (l'expression vient de là), il concourera à l'éclairage nocturne des grandes villes européennes, contribuant à améliorer de façon notable la sécurité des citoyens.
Le dihydrogène est le gaz le plus léger : 0,09 g/L dans les
CNTPLes CNTP ou conditions normales de température et de pression sont
considérées de façon arbitraire comme étant les conditions d'expérimentation et de mesure en laboratoire,
définies par une température de 0°C (273,15 K) et une pression de 1 atmosphère (soit 101 325 Pa ou 1,013
bars)..
Même lorsqu'il passe à l'état liquide (à -253°C, sous une pression de 1 bar), sa masse volumique reste très
faible : 71 kg/m3.
L'hydrogène est un véritable concentré d'énergie puisqu'à masse égale, sa combustion libère trois fois plus
d'énergie que l'essence. Malheureusement, même sous forme liquide , sa faible masse volumique fait qu'il occupe un
volume important : à quantité d'énergie libérée égale, il prend quatre fois plus de place que le pétrole.
Dans les solutions aqueuses, l'hydrogène peut donner des ions H+, responsables de leur
caractère acide. Le pH, nombre qui caractérise l'état acide ou basique d'une solution, est en effet
directement lié à la concentration en ions hydrogène : plus le pH d'une solution est faible, plus cette dernière
est acide et plus elle contient d'ions H+.
Les solutions acides sont omniprésentes dans la nature. Ainsi, la plupart des fruits donnent des jus acides.
Notre estomac lui-même contient de l'acide chlorhydrique, responsable des brûlures d'estomac et autres
remontées acides consécutives aux repas trop gras et aux excès d'alcool. L'acide chlorhydrique est en
effet l'un des principaux constituants des sucs gastriques, découverte faite en 1823 par un certain
William Prout (cela ne s'invente pas !), chimiste et médecin anglais auquel on doit également la
classification des aliments en lipides, glucides et protéines.
Plus surprenant, il existe sur Terre des lacs acides, l'un des plus connus (et des plus acides) étant
le lac qui s'est formé dans le cratère du volcan Kawah Ijen (dont le nom signifie "cratère vert"),
situé sur l'île de Java, en Indonésie
!.
Le pH de son eau étant proche de zéro, cette dernière est donc nettement plus acide que du vinaigre
ou du jus de citron (dont le pH est proche de 2,4) !
Annuellement, ce sont près de 75 millions de tonnes d'hydrogène qui sont produites au niveau mondial, principalement à partir de gaz naturel et de pétrole. Seule une petite partie de cette production provient de l'électrolyse de l'eau, le procédé étant nettement plus coûteux. Plusieurs méthodes sont employées, que nous allons décrire succintement.
- Le vaporeformage consiste à décomposer des molécules d'hydrocarbures légers (généralement du méthane), sous l'action de la vapeur d'eau à haute température (environ 900°C), sous une pression de 20 à 30 bars, en présence de nickel (qui joue le rôle de catalyseur). Avec le méthane, la réaction est la suivante :
CH4 + H2O ---> 4 H2 + CO2
Cette méthode assure à elle seule 48% de la production totale d'hydrogène.
- L'oxydation partielle couvre environ 30% des besoins en hydrogène. Celui-ci est obtenu en faisant réagir du dioxygène avec des hydrocarbures légers, à haute température (de 1 200 à 1 500°C) et sous forte pression (entre 20 et 90 bars). Toujours avec le méthane, la réaction est la suivante :
2CH4 + O2 ---> 4 H2 + 2CO
- La gazéification du charbon, qui assure environ 18% de la production d'hydrogène, consiste à produire un mélange de gaz (monoxyde de carbone, dihydrogène, dioxyde de carbone et méthane) à partir de charbon, d'oxygène et de vapeur d'eau (c'est un peu long à expliquer, alors je passe mon tour).
- L'électrolyse de l'eau ne couvre que 4% de nos besoins. Réalisée pour la première fois le 2 mai 1800 par les chimistes britanniques William Nicholson et Sir Anthony Carlisle, cette technique consiste à décomposer l'eau en dioxygène et dihydrogène gazeux grâce à un courant électrique. Bien que beaucoup plus coûteuse à mettre en oeuvre, elle présente toutefois l'avantage de ne pas émettre de CO2, à condition toutefois d'utiliser une électricité décarbonée (donc d'origine renouvelable ou nucléaire) : l'hydrogène ainsi produit est appelé hydrogène vert.
- La majeure partie de l'hydrogène produit sert à la synthèse de l'ammoniac (NH3), selon un procédé mis au point en 1909 par le chimiste allemand Fritz Haber. L'ammoniac s'avère en effet indispensable à la fabrication des engrais azotés (et de certains explosifs).
- L'hydrogène gazeux intervient dans le rafinage du pétrole dont il permet la désulfuration, afin de limiter les rejets d'oxydes de soufre, en partie responsables des pluies acides.
- L'hydrogène intervient également dans la production du méthanol (CH3-OH), alcool employé dans la synthèse de certaines matières plastiques, de résines synthétiques, de peintures, d'explosifs... Impropre à la consommation (il est hautement toxique), le méthanol est également utilisé comme antigel et comme carburant pour véhicules dans certains pays (Chine, Brésil).
- Favorisant la solidification des huiles végétales, l'hydrogène intervient dans l'élaboration des margarines.
- La pile à hydrogène (ou pile à combustible), dont le principe a été découvert en 1839 par le chimiste allemand Christian Schönbein (1799-1868), permet de produire de l'électricité grâce à l'oxydation de molécules de dihydrogène. Au niveau de l'anode, ces dernières sont décomposées en ions H+ (avec libération d'électrons), qui migrent ensuite vers la cathode (via un électrolyte) où ils se recombinent avec des ions oxygène (O2-), ce qui donne des molécules d'eau. L'électricité produite par la pile à hydrogène peut être utilisée pour alimenter des véhicules électriques (voitures, bus), des chariots élévateurs...
Le principal inconvénient de la pile à combustible est son coût, qui reste très élevé. En revanche, elle présente de nombreux atouts : elle ne dégage que de l'eau, offre un rendement supérieur à celui des moteurs thermiques, et s'avère silencieuse. Qui plus est, en cas d'inflammation du réservoir d'hydrogène, les conséquences sont moindres qu'avec un réservoir d'essence car la flamme d'hydrogène rayonne surtout dans l'ultraviolet (et non dans l'infrarouge comme l'essence), ce qui limite le risque de propagation de l'incendie.
- Lors de leur décollage, certains lanceurs alimentent leurs moteurs avec de l'hydrogène liquide (maintenu en dessous de - 253°C) et de l'oxygène liquide, qui sont injectés dans une chambre de combustion où ils brûlent en produisant de la vapeur d'eau à haute température (près de 3000°C), éjectée des tuyères à très grande vitesse. Les lanceurs Ariane 5 (à l'instar de la défunte navette spatiale américaine) utilisent ce type d'ergolsEn aéronautique, les ergols sont des substances chimiques (solides ou liquides) capables de fournir rapidement de grandes quantités d'énergie lors de leur combustion..
- L'hydrogène pourrait, dans un avenir plus ou moins proche, permettre de stocker de l'énergie, et constituer ainsi une alternative aux batteries. En ce sens, il s'agit non pas d'une source, mais d'un vecteur d'énergie, dans la mesure où il faut d'abord produire le dihydrogène avant de le stocker, pour ensuite l'utiliser quand le besoin s'en fait ressentir (voir ici !).
- Le deutérium, isotopeOn appelle isotopes des atomes ayant le même nombre de protons, mais qui différent par leur nombre de neutrons. de l'hydrogène dont le noyau comporte un proton et un neutron, est employé pour fabriquer l'eau lourde, qui joue le rôle de modérateur de neutrons dans certains réacteurs nucléaires, notamment ceux de type Candu, utilisés au Canada.
- Et puisqu'il est question de nucléaire, n'oublions pas de mentionner cette monstruosité qu'est la bombe à hydrogène (ou bombe H). Nous pouvons voir sur l'image ci-dessous l'explosion de la bombe la plus puissante jamais testée par les Etats-Unis, Castle Bravo, dont la puissance a été estimée à 15 Mt (mégatonnes), soit près de mille fois celle de la bombe d'Hiroshima. Les Russes ont quant à eux fait encore "mieux" (si l'on peut dire) en 1961, avec la Tsar Bomba et ses 57 mégatonnes (soit l'équivalent de 57 millions de tonnes de TNT !).
Cette liste est, bien entendu, loin d'être exhaustive.
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