L'histoire des constellations - Résumé

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Depuis la nuit des temps, les hommes contemplent la voûte céleste, faisant des étoiles le réceptacle de leurs mythes et inventant des constellations auxquelles ils donnèrent des noms de héros, de créatures fantastiques, d'animaux ou d'objets de la vie courante. Bien entendu, ces constellations revêtent également un aspect utilitaire, puisqu'elles permettent de se repérer dans l'espace et dans le temps, ce qui est bien commode lorsque l'on pratique la navigation ou l'agriculture. C'est leur histoire que nous allons retracer au long de ces quelques lignes.


Qu'est-ce qu'une constellation ?

Une constellation est une région du ciel délimitée par des contours précis, contenant un groupe d'étoiles censé représenter une figure conventionnelle. Lorsqu'un petit groupe d'étoiles semble dessiner une figure particulière, on parle plutôt d'astérisme. C'est ainsi que le fameux "W" de Cassiopée constitué de cinq étoiles, est un simple astérisme, tandis que la constellation de Cassiopée, à laquelle il appartient, inclut quant à elle toutes les étoiles (visibles à l'oeil nu ou non) situées dans une région dont les limites ont été définitivement fixées en 1930.


De la Mésopotamie à la Grèce antique

L'histoire de nos constellations commence dans l'ancienne Mésopotamie, vaste région située entre les bassins des fleuves Tigre et Euphrate. Les habitants de cette contrée, les Chaldéens, observent le ciel depuis le sommet de grands édifices religieux appelés ziggourats, afin d'étudier les mouvements des "astres errants" (la Lune, le Soleil et les planètes), dans lesquels ils pensent voir l'expression de la volonté des dieux. Cette tâche est dévolue à la caste des prêtres, qui tirent de ces observations des prédictions appliquées au devenir du pays : les récoltes seront-elles bonnes, y aura-t-il des guerres, les impôts vont-ils augmenter ? etc...

De nombreux textes, écrits sur des tablettes d'argile, attestent de l'ancienneté des constellations. Le Mul Apin, pour ne citer que lui, nous fournit une liste de près de 70 astérismes et étoiles avec leurs positions relatives, constituant ainsi l'une des plus anciennes cartes du ciel connues (la version la plus ancienne de ce document daterait en effet de l'an 1 370 av J.-C.). Les noms des astérismes chaldéens sont très variés : on y trouve aussi bien des animaux (taureau, serpent, coq, mulot...), que des objets (charrue, joug, balance...), ou des personnages (grands jumeaux, pasteur fidèle d'Anu...), répartis en trois zones distinctes (ou "chemins") de la voûte céleste. Vous pouvez en consulter la liste exhaustive ici-même !.

tablette BM 86 378 du Mul Apin

Une petite vingtaine d'astérismes, situés sur le "chemin de la Lune", acquièrent rapidement un statut particulier : très proches du plan de l'écliptique (à 5° près), ils sont en effet régulièrement "visités" par la Lune, le Soleil et les planètes. Vers le VIè siècle avant J.-C., ce nombre est ramené à douze suite à la partition du zodiaque en douze régions de 30° de large, à l'image du calendrier mésopotamien, divisé en 12 mois de 30 jours. Chacune de ces douze parties se voit alors attribuer un signe, correspondant à l'astérisme qui s'y intègre le mieux. En voici la liste complète : l'Homme Loué, les Etoiles, les Grands Jumeaux, le Charpentier, le Lion, l'Epi, le Bassin de la Balance, le Scorpion, Pabilsag, le Poisson-Chêvre, le Magnifique et les Queues. Nous voilà presque en terrain connu.

Ce sont ces mêmes constellations que les Grecs vont reprendre à leur propre compte, non sans leur avoir fait subir au préalable quelques transformations, histoire de les adapter à leur culture et à leurs mythes. Elles deviennent alors le Bélier, le Taureau, les Gémeaux, le Cancer, le Lion, la Vierge, la Balance, le Scorpion, le Sagittaire, le Capricorne, le Verseau et les Poissons. Nous devons ce travail à un certain Eudoxe de Cnide (406 - 355 av J.-C.), à l'origine du premier inventaire exhaustif de constellations, exposé dans un ouvrage aujourd'hui disparu, les Phaenomena, qui par bonheur nous a été transmis indirectement par le poète Aratos de Soles. Par la suite, le mathématicien, astronome, philosophe, et géographe Eratosthène, né en 276 av J.-C. dans la ville de Cyrène (dans l'actuelle Lybie), va se charger d'attribuer un mythe à chacune d'entre elles.

Ptolémée

Toutefois, si les constellations d'Eudoxe sont passées à la postérité, nous le devons avant tout à l'astronome et géographe Claude Ptolémée (vers 90-168), lequel observe avec assiduité le firmament depuis la ville d'Alexandrie, en Egypte. Il va nous transmettre ses observations dans une oeuvre magistrale, la Syntaxe mathématique, traduite bien plus tard en arabe sous le nom d'Almageste. Y figurent la position de 1028 étoiles, ainsi qu'une liste de quarante-huit constellations qui nous sont parvenus inchangées, exception faite du Navire Argo (voir ici !).


Des noms arabes pour les étoiles

Parmi les étoiles qui se sont vues attribuer un nom, près des deux tiers (soit environ deux cents !) le tiennent de l'arabe (Deneb, Albireo, Aldébaran, Bételgeuse, Phekda...). Pour en comprendre la raison, il faut se rendre à la cour de Bagdad, au IXè siècle, où le calife Al Mamoun fait traduire directement du grec à l'arabe l'ouvrage de Ptolémée aujourd'hui connu sous le nom d'Almageste (le "Très grand Livre").
Un peu plus tard, dans la ville Perse d'Ispahan, l'astronome Al Sufi (903-986) traduit à son tour l'Almageste en arabe, et y apporte quelques améliorations concernant la position et l'éclat des étoiles. En 964, il publie son Traité des étoiles fixes, dans lequel il établit une correspondance entre les noms grecs et arabes des étoiles formant les constellations de ptolémée.
Au cours du XIIè siècle, le Traité des étoiles fixes, ainsi que d'autres versions arabes de Ptolémée, seront transcrites en latin par les occidentaux. Toutefois, si ces derniers connaissent l'alphabet arabe, il semblerait qu'ils n'en maîtrisent pas toujours la vocalisation, faisant ainsi subir d'importantes déformations aux noms de ces étoiles.


De la Renaissance aux temps modernes

Aux XVè et XVIè siècles, les voyages d'exploration et l'invention de l'imprimerie permettent à la cartographie d'accomplir de réels progrès, qui bénéficient également à la représentation de la voûte céleste. De nombreux atlas célestes voient le jour, tels celui de Petrus Apianus, dédié à l'empereur Charles Quint, ou encore celui d'Alessandro Piccolomini, où les étoiles se voient attribuer des lettres de l'alphabet latin en fonction de leur éclat. En 1603, l'astronome allemand Johann Bayer (1572-1625), avocat féru d'astronomie, publie à Augsbourg le premier véritable atlas couvrant la totalité de la voûte céleste, l'Uranometria, basé en grande partie sur les observation du danois Tycho Brahé, le plus grand astronome de son époque. Il y remplace les lettres latines par des lettres grecques, et y intègre douze nouvelles constellations de l'hémisphère austral (Paon, Indien, Toucan,...), nouvellement créées par un certain Plancius, qui s'est lui-même inspiré des récits de deux navigateurs hollandais (Keyser et Houtman).

En 1627, l'avocat (et astronome) allemand Julius Schiller (1580-1627), tente de christianiser le ciel, substituant aux constellations jugées impies des images plus en accord avec sa foi chrétienne : les constellations du zodiaque sont remplacées par les douze apôtres du Christ, celles de l'hémisphère boréal deviennent des personnages du Nouveau Testament et celles de l'hémisphère austral des personnages de l'Ancien Testament. Il n'obtient toutefois aucun succès, y compris dans les milieux catholiques, et ses travaux tombent rapidement dans l'oubli.

Johannes Hevelius (ou Jean Hevel) (1611-1687) crée quelques constellations mineures dans l'hémisphère nord, histoire de "combler" les espaces vides, tandis qu'un siècle plus tard l'abbé Nicolas-Louis de Lacaille (1713-1762) se charge de complèter l'hémisphère sud, inventant quatorze nouvelles constellations reflétant les progrès techniques de son époque (Microscope, Boussole, Télescope, Horloge,...). La liste de nos constellations (88 en tout et pour tout) est enfin complète (voir ici !). En réalité, il y en aura même davantage, mais nombre d'entre elles (l'Aérostat, le Chat, Le Messier et bien d'autres encore) vont tomber définitivement dans l'oubli, et il faut attendre l'année 1930 pour que cette liste de 88 constellations soit approuvée et que leurs contours soient définitivement fixés par l'astronome Belge Eugène Delporte et l'UAI (Union astronomique internationale).

Vous pouvez bien sûr vous contenter de ce maigre résumé, mais un exposé beaucoup plus complet vous attend ici !, alors au boulot, et que ça saute !


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